Frank Ojimma Chukwu, plus connu sous le pseudonyme de Gbomita, est un agent de football très connu au Togo et partout en Afrique. Il lève le voile sur les multiples facettes de son métier, révélant les enjeux, les défis et les subtilités qui animent le quotidien de ceux qui œuvrent dans l’ombre des terrains de jeu.
Dans le cadre de notre série d’articles #ParoleAuxAgents, Frank Ojimma Chukwu s’est exprimé en exclusivité pour Africafoot.
Pourriez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Sincèrement, je n’avais pas la motivation dès le départ. J’ai voulu donner un coup de main à des jeunes Camerounais qui étaient à l’époque venus à Lomé par l’intermédiaire du frère de Ouadja Lantame. Ils étaient à Lomé, mais ils avaient de petits soucis concernant leur restauration et leur hébergement, car ils n’avaient pas de lieu où dormir.
Je les ai aidés à s’héberger et à se restaurer, le temps qu’ils puissent trouver une destination. Mais après, c’était un peu plus compliqué pour eux puisque leur contact ici ne venait pas. Ils étaient venus à Lomé pour un essai.
J’ai touché deux mots au feu Auguste Sagbo, qui était président d’Agaza de Lomé. Il m’a dit de les amener dans son club pour les tests. Ils étaient quatre, et au final, deux ont été gardés.
À l’époque, j’avais 19 ans. Un jour, M. Sagbo m’a invité chez lui et m’a demandé si je savais qu’il existait un métier appelé agent de joueur. Il estimait que si j’avais eu l’habileté d’aider ces jeunes, cela pourrait être mon gagne-pain. Il m’a orienté vers la fédération togolaise, et Hugues Rhodes m’a ouvert ses portes et m’a donné une idée de comment cela fonctionne. Et c’est de là que tout est parti.
Le football m’a donné les informations nécessaires. Ils m’avaient fait savoir à l’époque qu’il y avait sur place quatre agents dans le domaine qui avaient déjà leur licence. J’ai essayé de les contacter. Hugues Rhodes m’a ouvert ses portes, m’a donné une idée de comment cela fonctionne. Et c’est de là que c’est parti.
Est-ce que vous-même vous étiez joueur ?
C’était juste à l’école, puisque j’ai fait le collège protestant de Lomé. Je jouais au poste d’ailier droit. Mais à l’époque, vous savez, ce n’était pas comme aujourd’hui. Vous allez jouer, et au retour ce sont des coups de bâton qui pleuvent. Donc, ça n’a pas vraiment aidé à aller loin dans ça. Parce que pour les parents, c’était les études avant tout.
Comment vous sélectionnez vos joueurs que vous aidez, vous accompagnez ?
Je peux dire qu’avec le temps, j’ai appris. D’abord, je suis un autodidacte, car j’ai appris à détecter moi-même mes talents à travers mes propres stratégies. À l’époque, il n’y avait pas Internet. Mais l’avantage que j’ai eu, c’est qu’après avoir obtenu mon bac ici à Lomé, je suis allé au Ghana où j’ai étudié à l’université de Legon à Accra. J’ai aussi étudié l’informatique.
Comment vous détectez, vous constatez, quand vous voyez un jeune, comment vous savez que celui-ci peut avoir une carrière ?
Aujourd’hui, nous parlons en termes de profil de joueur. Tant que vous êtes manager, vous avez aussi cette latitude de placer les entraîneurs. Sur ce, j’ai beaucoup côtoyé les entraîneurs, à communiquer avec eux, à ressortir leurs besoins. Et c’est à partir de cet instant que ça m’a permis de mieux gérer mes détections.
Au-delà de placer les joueurs, qu’est-ce que vous faites avec les joueurs en dehors de la période de mercato ?
Bon, il y en a qui disent que le métier d’agent de joueur, c’est comme le métier de démarcheur. Je dirais que c’est un faux problème. Si vous prenez ça sous cet angle, vous allez commencer, mais vous allez vous perdre. Parce qu’il y a même certains qui ont essayé, qui ont vu ça sous cet angle-là et se sont intéressés à la chose. Mais après, ils se sont rendus compte que c’était plus complexe que ça.
Je viens de dire, si vous êtes agent de joueur, il faut avoir une structure. D’abord, une entreprise, un cabinet, où vous allez vraiment mettre en place vos stratégies, vos moyens. Bon, tout dépend de votre vision, tout dépend de ce que vous voulez en faire. Dans le football, vous allez rencontrer un jeune talentueux, très talentueux. Mais maintenant, c’est à vous de l’encadrer.
Vous allez dépenser. Si, généralement, les talentueux, c’est des démunis, en fait, et qui dit démunis, il dit quelqu’un qui se cherche lui-même. Tu dois amener cette personne-là à créer une relation entre vous, la confiance.
Comment voyez-vous l’évolution du métier d’agent en Afrique ?
Bon, moi, je ne vois pas vraiment de changement. Sur le plan global, je ne vois pas beaucoup de changement. D’ailleurs, c’est pour ça que la FIFA a voulu toiletter un peu les choses, a voulu modifier beaucoup, quand ils entendent agent de joueur, c’est commission. Ils ont déjà l’esprit, le pourcentage.
Individuellement, il y en a qui se sont imposés, c’est-à-dire, ceux qui ont pris le métier là, d’abord, sont passionnés. Parce que tout métier, il faut être passionné pour pouvoir avoir de meilleurs rendements dedans.
Donc, ceux qui l’ont pris à bras-le-cœur ont mis en place des stratégies, ont mis en place des plannings, ils se sont fixés des objectifs avec des visions claires et nettes.
Est-ce qu’aujourd’hui c’est plus difficile de faire signer un joueur africain en Europe ?
Faire signer un joueur, c’est ma réponse à moi, c’est le plus facile à faire puisque pour faire voyager un joueur, vous devez avoir un projet. Quand vous êtes bien structuré, pour faire signer un joueur, c’est plus facile. Maintenant, pour que le joueur puisse s’imprégner, pour pouvoir s’adapter et évoluer, c’est ça qui est le problème.
Qu’est-ce qu’il cherche ? Quels sont les critères sur lesquels il mise ?
Je vais vous choquer. Aujourd’hui, le Togo, en Afrique de l’Ouest, possède les meilleurs joueurs. Vous n’allez pas me croire, mais techniquement, tactiquement, sur le plan social, le Togo possède les meilleurs joueurs depuis fort longtemps.
Le Togo, c’est une mine d’or. Vous envoyez des recruteurs, ils viennent et ils sont surpris. Il y en a qui viennent chaque année, mais ils sont surpris. Mais après, il peut s’intéresser à deux ou trois joueurs. Après, il n’y a plus de suite.
Qu’est-ce qui fait qu’il n’y a pas de suite ? Ce sont les joueurs qui ne s’adaptent pas ?
Je dirais que c’est l’environnement, en fait. Je dis qu’on a les meilleurs joueurs au Togo. On a de très bons coachs au Togo. Et ce n’est pas une question de compétition. La preuve, c’est que tout le monde dit… Et puis, il faut savoir que ce n’est pas en devenant le meilleur buteur d’un championnat que vous allez trouver un club, non. Ça, il faut vraiment l’effacer de son esprit.
Quel conseil vous donneriez à ceux qui veulent devenir agent de joueurs ?
Le premier conseil, si vous voulez devenir agent de joueurs, rassurez-vous que vous n’avez pas moins de 10 millions d’argent, minimum. Le premier atout que vous devez avoir en voulant être agent de joueurs, c’est d’avoir de l’argent. C’est pour ça que je dis que c’est un métier qui est très complexe. Oui, c’est très complexe.
C’est bien d’avoir la licence, mais après il faut créer sa structure avec toutes les démarches administratives. Il faut aussi aller chercher les contacts, et pour cela, il faut voyager. C’est à vous d’aller chercher vos contacts, vos relations. Donc, si vous voulez placer des joueurs à Abidjan, il faut que vous alliez à Abidjan.
Vous devez aussi avoir un background sur le management. Que ce ne soit pas forcément le management sportif, mais le management en général, même si vous avez fait des études, peut-être niveau licence, bien, même si c’est au cours du soir, vous devez avoir une base sur le management, comment apprendre les techniques de négociation, vers des personnes responsables, des autorités.
Dans notre série d’articles #ParoleAuxAgents, à lire également : Taban Camara décline sa méthode de travail.
Télécharger 1xBet
Télécharger Betwinner
Télécharger MelBet
Télécharger 1Win